Quel régime social pour le gérant d’une SCI ?
Lorsqu’on monte une société civile immobilière (SCI), il faut obligatoirement nommer un gérant à sa tête. Ce mandat ouvre-t-il droit à une protection sociale ? Plus précisément, quel sera le régime social du gérant ?
Rappelons d’abord qu’en tant que sociétés civiles, les SCI ne pratiquent pas d’activité commerciale. Le but d’une SCI est de gérer un patrimoine immobilier détenu en commun, dans le cadre d’une SCI familiale par exemple.
Quoi qu’il en soit, le gérant d’une SCI est nommé par les associés pour administrer et représenter la société. À ce titre, il signe les actes au nom et pour le compte de la SCI, et a le pouvoir de l’engager vis-à-vis de tiers par tous les actes qui entrent dans son objet social. Il peut être une personne physique ou morale, associé ou non.
Pour bien comprendre à quoi correspond un régime social, il est utile de rembobiner jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre, à l’époque ou naissait la Sécurité sociale.
Créée en 1945 par l’ordonnance du 4 octobre, la Sécu a vocation à être « la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes ».
Pour faire simple, la Sécurité sociale se décompose en trois branches :
- Famille, gérée par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) ;
- Maladie, Accidents du travail et Risques professionnels, gérée par la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) ;
- Vieillesse, géré par la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV).
Parce que certaines professions ou branches d’activité bénéficiaient déjà de dispositifs spécifiques, qu’ils ont souhaité conserver, la Sécurité sociale s’est scindée en plusieurs régimes :
- le régime général : Salariés et indépendants, étudiants, professions libérales non réglementées, chômeurs, soit 88 % de la population ;
- le régime agricole : Exploitants et salariés agricoles, soit 5 % de la population ;
- les régimes spéciaux : Fonction publique ; entreprises et établissements publics (SNCF, RATP…) ; régimes minoritaires réunis autour d’une profession ou d’une entreprise (notaires, militaires, retraités des mines, Comédie française, Opéra de Paris, etc.). On comptait encore 27 régimes spéciaux en 2021, regroupant environ 7 % de la population.
Bien que le gérant d’une SCI relève a priori du régime général de la Sécurité sociale, sachant que les travailleurs non salariés y sont rattachés depuis 2018, le niveau de protection sociale dépend aussi du statut de l’assuré. C’est ce qui explique que les salariés et les indépendants, qui relèvent pourtant du même régime, ne soient pas logés exactement à la même enseigne en matière de Sécu.
La réponse ne consistera donc pas à dire : régime général ou régime spécial, mais plutôt travailleur non salarié, ou assimilé-salarié, ou rien. Ceci étant admis, et compte tenu du fait que l’on croise partout l’expression « régime social », conservons ce terme pour la suite.
Reprenons. Le régime d’affiliation du gérant d’une SCI dépend donc de son statut. La première question à se poser est : Le gérant est-il associé ? Ensuite, s’il est rémunéré, est-il considéré comme un travailleur non salarié ou comme un assimilé-salarié ? En fonction de la réponse, le régime varie. Et si le gérant ne perçoit pas de rémunération au titre de son mandat, qu’en est-il ?
Pour savoir de quel régime social le gérant d’une SCI relève, il sera ainsi nécessaire de distinguer plusieurs cas.
- Quel régime social pour un gérant qui est également associé de la SCI ?
- Le gérant associé est rémunéré
- Le gérant associé n’est pas rémunéré
- Quel régime social pour un gérant qui n’est pas associé de la SCI ?
- Il existe un lien de subordination entre le gérant et la SCI
- Il n’existe pas de lien de subordination entre le gérant et la SCI
- SCI à l’IR ou à l’IS : qu’est-ce que ça change ?
- Rémunération du gérant de SCI : ce qu’il faut savoir
Avant d’entrer dans le vif du sujet, rappelez-vous que vous pouvez vous rapprocher de nos équipes si vous avez des questions au sujet de votre projet, qu’il s’agisse d’éclaircissements techniques ou plus largement de votre démarche de création d’entreprise.
Quel régime social pour un gérant qui est également associé de la SCI ?
Si le gérant se trouve être l’un des associés de la SCI, il faut distinguer deux cas pour savoir à quel régime social il est affilié.
Le gérant associé est rémunéré
Si le gérant de la SCI est associé et perçoit une rémunération, il relève de la Sécurité sociale des indépendants (SSI ex RSI) et est donc affilié au régime général.
Notez que le versement d’une rémunération au gérant d’une SCI doit respecter certaines modalités que nous indiquerons à la fin de cet article.
Le gérant associé n’est pas rémunéré
Si le gérant associé ne perçoit pas de rémunération, il ne cotise pas et n’est donc affilié à aucun régime social au titre de son mandat. On rencontre souvent ce cas dans les SCI familiales dont la gérance ne représente pas une charge de travail importante. Cela n’empêche cependant pas le gérant d’être protégé (confer la définition de la Sécurité sociale rappelée plus haut), ou bien par le biais d’une autre activité qu’il exerce, ou même au titre de chômeur, et pourquoi pas d’étudiant.
Quel régime social pour un gérant de SCI qui n’est pas associé ?
Il existe un lien de subordination entre le gérant et la SCI
S’il est possible de prouver qu’il existe un lien de subordination entre le gérant et la SCI, via un contrat de travail par exemple, le gérant non associé aura le statut d’assimilé-salarié et sera en conséquence rattaché au régime général.
Attention cependant, s’il bénéficie dans ce cas d’une assurance maladie et d’un droit à la retraite, contrairement aux salariés du privé, le gérant ne cotisera pas à l’assurance chômage et n’en bénéficiera donc pas en fin de mandat ou en cas de révocation.
À noter : Le cas est plutôt rare dans les faits, pour la raison que l’objet social d’une SCI est en général très large. Ce qui rend la « subordination » du gérant difficile à démontrer.
Il n’existe pas de lien de subordination entre le gérant et la SCI
En l’absence d’un lien de subordination entre le gérant et la SCI, le gérant relève du statut des travailleurs non salariés, au même titre que le gérant associé percevant une rémunération. Il sera donc affilié à la Sécurité sociale des indépendants, au sein du régime général.
Imposition l’IR ou à l’IS : qu’est-ce que ça change pour le régime social du gérant de la SCI ?
Rappelons qu’une SCI, par défaut, est imposée à l’impôt sur le revenu et est soumise à une fiscalité dite transparente. Ce qui signifie que chaque associé est redevable de l’impôt proportionnellement à la part qu’il détient dans la société.
Toutefois, une SCI peut librement opter pour l’impôt sur les sociétés (IS). Cette option est irrévocable.
Si son activité est requalifiée d’activité commerciale, c’est également à l’IS qu’elle sera imposée. Dans ce cas, la SCI relève de la simple gestion de patrimoine. Un vide juridique apparaît alors en ce qui concerne le régime social du gérant.
Si la SCI a l’obligation d’une imposition à l’IS, le gérant relève, au même titre que le gérant d’une société commerciale, du régime général, en tant que travailleur non salarié (SSI).
Rémunération du gérant de SCI : ce qu’il faut savoir
La rémunération du gérant d’une SCI n’est ni automatique ni obligatoire, mais librement fixée par les associés.
On l’a vu, un gérant associé qui perçoit une rémunération au titre de son mandat est considéré comme un travailleur non salarié et est en conséquence affilié à la SSI. Cependant, s’il gagne sur un tableau, il se peut que la SSI perde sur l’autre.
Pourquoi ? Parce qu’en cas d’imposition à l’IR, la rémunération d’un gérant associé, considéré comme une avance sur les dividendes n’est donc pas déductible du résultat imposable, contrairement à celle d’un gérant non associé. Si la SCI est imposée à l’IS, la rémunération du gérant, même s’il est associé, est déductible.
Précisons aussi qu’il est possible de cumuler rémunération au titre d’un mandat de gestion et contrat de travail avec la SCI. Il faut dans ce cas que le travail soit effectif, dissociable des actes de gérance, et qu’il y ait un lien de subordination entre le gérant et la société.
Le régime social du gérant est ainsi à mettre en balance avec le mode d’imposition de la SCI. S’il est fiscalement plus intéressant pour les associés de rester à l’IR, il faut bien réfléchir avant d’accorder une rémunération au gérant, bien qu’elle lui permette d’être couvert, car elle coûtera cher à la société, n’étant pas déductible. D’autant plus cher d’ailleurs que la rémunération du gérant, il ne faut pas l’oublier, fait l’objet de charges sociales.
Conclusion
Pour résumer ce qui précède, disons simplement :
- Le gérant associé perçoit une rémunération ? Il est affilié à la Sécurité sociale des indépendants.
- Il n’en perçoit pas ? Pas de protection sociale liée à son mandat.
- Le gérant n’est pas associé et il existe un lien de subordination entre la SCI et lui ? Il relève du statut d’assimilé-salarié, au même titre que le président d’une SAS et bénéficie dans ce cas de droits presque aussi importants que les salariés, à l’exception de l’assurance chômage.
- Le gérant n’est pas associé et il n’existe pas de lien de subordination entre la SCI et lui ? Retour au premier cas : il écope du statut de travailleur non salarié.
Il est vrai, le mode d’imposition de la SCI et les modalités liées au versement d’une rémunération au gérant viennent encore pimenter la question. Toutefois, considérant que le régime des travailleurs indépendants a convergé avec le régime général, et que les cotisations et les protections sont désormais presque alignées, cela ne change dans le fond pas grand chose.
Le seul cas qui pourrait se révéler vraiment problématique est l’assurance d’un gérant associé non rémunéré. Mais s’il n’est pas rémunéré, c’est sans doute parce que son mandat est exercé à titre d’activité annexe. On peut alors raisonnablement supposer qu’il est couvert par ailleurs.
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