Comment gérer sa santé quand on est Freelance à l’étranger ?
La santé du freelance à l’étranger est un sujet récurrent lorsqu’on se lance en tant que Digital Nomad.
En 2021, les freelances ayant des envies de nouveaux horizons sont devenus des Digital Nomads. Ce terme s’est popularisé lors de la crise sanitaire mondiale et le statut de « freelance international » poursuit aujourd’hui son développement.
Mais derrière cette appellation quel est le statut social des freelances internationaux ? La Sécurité Sociale définit le statut de l’indépendant en France et celui de l’expatrié qui part travailler à l’étranger mais, pour celui de l’indépendant qui part à l’étranger avec des clients qui peuvent être à la fois français et étranger, ça se complique.
Dans cet article, vous prendrez connaissance des démarches au niveau de votre santé et de vos soins, puis dans une seconde partie, nous vous donnerons quelques clés pour comprendre la protection sociale pour vos courts séjours dans l’UE et hors UE. Nous finirons par le cas du freelance au long cours.
1) Qu’en est-il de votre santé et de vos soins et des visas ?
Covid, vaccins et visas
Travailler de l’étranger, ce n’est pas faire du tourisme. Autant, pour les courts séjours la question ne se posait que rarement avant la crise Covid, autant les règles sanitaires ont renforcé les règles de passages des frontières en imposant des vaccins, des pass sanitaires et en révisant les fonctionnements des visas, quitte à en créer de nouveaux prévoyant précisément le statut des freelances.
Avant de vous rendre dans votre pays de destination, vous devez consulter régulièrement les formalités en vigueur dans votre pays d’accueil. Chaque pays établi ses propres critères, mais d’une manière générale et depuis la pandémie, vous aurez besoin d’avoir une preuve d’assurance santé.
Aujourd’hui certains pays ont levé quelque restriction sanitaire, par exemple depuis le 12 juin 2022, si vous partez vers les USA vous n’avez plus besoin de vous soumettre à un test de dépistage du Covid-19 avant de prendre l’avion.
Au Canada vous serez exemptés de quarantaine à votre arrivée si vous respectez toutes les exigences nécessaires, c’est-à-dire être entièrement vacciné au sens des autorités canadiennes.
En Italie, depuis le 1er juin 2022, le pass sanitaire n’est plus exigé. Idem pour la Grèce, depuis le 1er mai 2022.
Cependant, pour certains pays, comme l’Australie, vous devrez disposer de votre schéma vaccinal complet si vous souhaitez vous rendre sur le sol australien.
En termes de visas, les « visas touristiques » interdisent généralement de travailler et les exemptions de visas concernent les touristes et non les travailleurs, quels qu’ils soient.
Par exemple, si vous vous rendez aux USA avec un ESTA, vous ne pourrez pas travailler sur le sol américain, ni venir y chercher du travail. Vous pourrez être refusé d’accéder aux USA si vous y allez pour télétravailler. Idem, pour le Canada, l’AVE est une exemption de visa valable pour les touristes.
En effet, le freelance international est un concept assez récent et seuls quelques pays ont récemment créé des visas spécifiques offrant l’opportunité aux freelancers internationaux et Digital Nomads de télétravailler dans leur pays.
Prenons l’exemple d’un des pays les plus populaires en termes de télétravail, Dubaï, qui a mis en place le Virtual Working Program, un visa vous permettant d’y travailler pendant 1 an.
En Thaïlande vous avez le Smart Visa qui est spécialement conçu pour attirer les travailleurs hautement qualifiés. À Malte c’est le Digital Nomad Residency ; en Allemagne ça sera le Freelance Freiberufler ; en Croatie ce sera le Digital Nomad Visa.
Il existe encore une dizaine de pays qui ont mis en place des visas spécifiques pour les travailleurs indépendants.
Trouver des médecins sur place
Trouver un médecin à l’étranger est souvent un important sujet de préoccupation pour les voyageurs et les expatriés.
Une des choses importantes à se rappeler est que les soins médicaux que vous recevrez à l’étranger ne sont souvent pas les mêmes que ceux dont vous avez l’habitude en France.
Donc, pour trouver un médecin, vous pourrez soit demander à vos contacts (proches, amis, connaissances), soit consulter les listes des consulats, les hôpitaux publics, soit opter pour la téléconsultation.
Les hôpitaux publics ou les gros hôpitaux privés sont souvent une bonne solution pour les urgences graves, mais ils ne vous accueilleront pas pour des soins plus simples.
Vous pourrez alors avoir recours à des centres de soins ou des walk-in clinics, qui regroupent plusieurs professionnels de santé et peuvent accueillir des patients étrangers.
Les consulats de France disposent souvent de listes de médecins parlant français. Ces listes sont accessibles en ligne, mais les délais de prises de rendez-vous peuvent être longs.
Vous pouvez retrouver la liste des ambassades et consulats français à l’étranger sur le site du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
Les services de téléconsultations ont explosé depuis le Covid. Ils présentent de nombreux avantages de disponibilité, de langue, d’habitudes des pratiques, etc. La téléconsultation permet alors de pouvoir consulter un généraliste ou même un spécialiste.
Ça peut être très utile si vous séjournez dans une région où les spécialistes sont rares.
Ces services ont été inclus dans la plupart des assurances voyages. Vous pouvez y accéder en cas d’urgence et l’assureur prendra en charge vos soins.
Vous pouvez également vous inscrire sur des plateformes de téléconsultations et payer vous-même vos consultations.
Si la Sécurité Sociale prévoit le remboursement des téléconsultations, elle le fait dans des conditions très strictes, notamment de proximité par rapport à votre lieu de résidence habituelle et ne pourra pas fonctionner pour des séjours temporaires hors de France (Vous pouvez consulter le site d’Ameli pour plus d’informations à ce sujet).
La limite de la consultation peut concerner les prescriptions. Dans certains pays, il ne sera pas possible d’acheter des médicaments avec une prescription faite par un service de téléconsultations français.
Certaines plateformes internationales permettent d’obtenir des prescriptions locales. Vérifiez éventuellement ce point avant de téléconsulter.
Le coût d’hospitalisation dans le monde
Pour un freelance international, s’expatrier, c’est aussi dépendre du système de soins du pays d’accueil. En France, grâce à la Sécurité sociale, il est parfois difficile de se rendre compte du véritable coût d’une consultation ou bien d’une hospitalisation.
Prenons l’exemple des Etats-Unis, le pays classé « le plus cher au monde » en termes de soins, car les coûts des consultations, d’examens ou de chirurgie peuvent être jusqu’à 10 fois plus élevés qu’en France.
Une consultation médicale chez un généraliste s’élève à 190 USD (soit environ 170 €). Une appendicectomie réalisée aux États-Unis coûtera en moyenne 33 000 USD (soit environ 29 000 €), contre seulement 600 € en France.
Pour éviter d’avoir à payer de telles sommes, il est donc indispensable de souscrire une assurance santé internationale avant son départ.
Les prestations de soins au Royaume-Uni sont fournies par le NHS (National health service). Malgré le Brexit, avec la CEAM, vous y serez accueillis gratuitement pour les soins urgents et vitaux. Cependant, les soins dans le privé seront 4 à 6 fois plus chers qu’en France. En effet, une consultation privée peut varier entre 75£ et 250£ (soit 95€ et 315€), idem pour une consultation chez un spécialiste.
Voici aussi une liste de quelques pays où les coûts sont beaucoup plus chers qu’en France : Suisse, Brésil, Australie, Canada, les Émirats-Arabes-Unis quelques pays d’Asie comme Hong Kong, la Chine, le Japon ou Singapour, quelques pays d’Europe comme la Norvège, l’Espagne, l’Italie.
Certains pays où le coût de la vie est relativement bas par rapport à la France, seront chers en matière de santé, car les structures accueillant des patients étrangers sont privées et réservées à une élite locale. C’est le cas au Mexique, au Chili, en Thaïlande, en Afrique du Sud, etc.
Dans certains pays, notamment en Asie ou en Amérique du Sud, les hôpitaux ne vous accepteront pas si vous ne pouvez pas payer une caution de 10 000 ou 20 000$ ou présenter une attestation d’assurance.
Comment gérer un traitement ou une pathologie chronique
Pour un court séjour, assurez-vous d’avoir suffisamment de traitements pour la durée du séjour. Si vous devez prendre un traitement qui ne pourra pas être acheté sur place en cas de perte de vos médicaments, un service d’envoi de médicaments peut être utile. C’est inclus dans la plupart des assurances voyages.
Si vous avez besoin de soins sur place et que vous séjournez dans l’UE, votre CEAM peut vous servir pour la prise en charge de vos soins, mais veillez à vérifier la disponibilité des soins dans votre région de résidence. De nombreux services de santé fonctionnent en flux tendus et peuvent difficilement accueillir des patients étrangers.
Si vous séjournez hors UE, vous devrez trouver des structures de soins privées susceptibles d’assurer vos soins, mais vous devrez aussi les financer vous-même car :
- la Sécurité Sociale ne couvre à l’étranger que les soins urgents et inopinés lors des séjours temporaires ;
- les assurances voyages ne couvrent aussi que les soins urgents et inopinés ;
- les assurances pour expatriés excluent les conditions pré-existantes à la souscription, à moins d’avoir été déclarées et acceptées par l’assureur.
Pour un séjour de plus de 6 mois, la solution sera peut-être d’adhérer à la Caisse des Français de l’Etranger, mais sa prise en charge ne sera que partielle et dépendra de votre pays de soins. Plus le pays est cher, moins son taux de remboursement est élevé.
2) La protection sociale pour les courts séjours
Soyez prudent sur tous les détails, car la Sécu ne vous couvre pas à l’étranger si vous ne conservez pas de domicile officiel et réel en France, cela quelle que soit la durée et la destination, dès la date de votre départ et même si vous continuez de cotiser en France pour votre activité professionnelle.
Le détachement
Pour les indépendants, théoriquement, le détachement existe bien qu’il soit très encadré :
- vous êtes limité à 24 mois ;
- il faut justifier d’une structure et d’une activité en France, avant le départ ;
- il faut la conserver et payer les impôts taxes en France pendant le détachement.
Compte tenu de son coût élevé, l’intérêt ne se justifie que pour des durées inférieures à 1 an.
Pour les frais de santé d’un freelance à l’étranger, vous êtes alors rattaché à la caisse de votre pays d’accueil, mais vous pouvez aussi obtenir des remboursements de la part de votre caisse d’affiliation d’origine.
Dans l’UE
Lorsque vous conservez un domicile officiel et réel en France et que partez dans des pays de l’UE pour une période de 6 mois, dans ce cas-là vous restez assuré à la Sécu et vous pouvez utiliser la CEAM. Cependant, si vous séjournez sur une période de 6 à 12 mois, pour la Sécu, vous ne pouvez pas avoir deux domiciles. Effectivement, il faudra certainement alors vous faire rattacher à votre pays d’accueil ou opter pour un détachement.
La CEAM par définition vous permet d’utiliser le système de santé de votre pays d’accueil comme un résident local. Elle couvre les frais médicaux et les médicaments durant votre séjour à l’étranger à hauteur des remboursements accordés par la sécu de votre pays d’accueil. Cependant, cela ne signifie pas que tous les soins sont gratuits, car souvent, les soins dans le privé seront entièrement payants. Une assurance voyage pourra vous faciliter la vie et si vous partez moins de 3 mois, une assurance de CB pourra même suffire. Au-delà, il faudra souscrire une assurance voyage spécialisée.
Hors de l’UE
Vous restez assuré à la Sécu qui vous couvrira sur la base française si vous partez dans des pays hors UE pour une durée de 6 mois ou moins et que vous conservez un domicile officiel et réel en France.
Si vous partez plus de 6 mois, vous devez savoir que vous ne pouvez pas avoir deux domiciles au sens de la Sécu et qu’il faudra alors que vous vous rattachiez à votre pays d’accueil si un régime existe.
Le plus souvent, si vous ne voulez pas être limité aux services publics, il faudra souscrire une assurance santé privée, locale ou internationale.
Pour freelance au long cours
Le régime du pays d’accueil
Si un régime existe, il faudra voir si vous pouvez en bénéficier s’il peut vous convenir. Beaucoup de pays réservent leur système d’assurance maladie à leurs citoyens ou résidents permanents.
C’est le cas notamment dans la plupart des pays pauvres ou en développement, mais aussi dans de nombreux pays de l’OCDE, tels que l’Australie, Nouvelle-Zélande, Mexique, Chili, Costa Rica, ou encore des pays tels que Singapour, la Thaïlande, la Malaisie, etc.
Pour les autres, il faudra payer le prix fort, aussi bien dans le système privé que public.
Dans la majorité des pays, les systèmes publics et privés sont totalement dissociés. L’assurance maladie locale vous permet d’accéder aux soins du service public, mais le secteur privé est entièrement à votre charge et les prix y sont libres.
C’est le cas dans de nombreux pays de l’UE tels qu’Espagne, Portugal, Italie, Irlande ; ou dans la quasi-totalité des pays d’Amérique du Sud, d’Afrique et d’Asie.
Il faudra savoir alors si le système public du pays d’accueil peut vous convenir : en dehors de la capacité d’accueil, se posent plusieurs questions :
- Les équipements médicaux peuvent être rares, notamment pour les diagnostics avancés, surtout en dehors des grandes villes ;
- La langue peut poser problème, les médecins parlant correctement anglais travaillant généralement dans le privé ;
- Le cultural gap en matière de soins, car des soins qui peuvent vous paraître importants peuvent sembler totalement superflus ailleurs.
Pour plus d’informations sur les régimes des différents pays, vous pouvez consulter les pages pays du site spécialisé.
Les expatriés sont finalement quasiment obligés de se soigner dans le secteur privé, mais il faut alors pouvoir en assumer le prix.
La CFE pour garder un lien avec la Sécu
La CFE est ouverte à tous les Français résidant à l’étranger, mais également à tous les ressortissants de l’UE et de l’EEE résidant hors de France et de l’UE.
Son adhésion est facultative et elle ne donne qu’un remboursement partiel qui varie en fonction de votre pays de résidence (soit 19% de la dépense pour une hospitalisation au Royaume-Uni ou 66% au Maroc) et nécessite un remboursement complémentaire pour être couvert à 100%.
La CFE comprend également des offres en matière de prévoyance arrêt de travail et invalidité et de retraite pour continuer à valider vos trimestres à l’Assurance Vieillesse, mais ces offres sont réservées aux salariés.
Si vous êtes free-lance, vous ne pouvez donc normalement pas choisir de cotiser à ces services, à moins de passer par les services d’une structure de portage salarial. Cette solution peut être intéressante pour les séjours de durée intermédiaire, de 6 mois à 5 ans.
Toute votre protection sociale via des assurances privées
On parle ici de ce que l’on connaît en France avec :
- la Sécu : qui assure la base pour les frais de santé, les maintiens de revenus et la retraite ;
- les mutuelles : qui complètent les remboursements des frais de santé ;
- les institutions de prévoyance ou assureurs vie : qui complètent les maintiens de revenus, les rentes d’invalidité et les capitaux décès ;
- les caisses de retraite et les assureurs vie : pour les retraites complémentaires et par capitalisation.
Tous ces services peuvent être assurés à 100% par des assureurs privés français ou locaux.
Pour la partie santé, dans les pays qui ont un système d’assurance maladie fort, le choix pour une assurance locale pourra être privilégié. Dans les autres, les assurances santé existent, couvrent correctement les accidents et les pathologies courtes, mais sont très limitées sur le long terme.
C’est lié à l’application d’un droit des assurances souvent dérivé du droit anglais où l’assureur peut résilier l’assuré chaque année, comme pour une assurance auto.
Une assurance expatriée de droit français offrira des garanties incomparables et permettra de vous soigner dans votre pays d’accueil, mais aussi en France.
Elle inclura également des services de téléconsultation ou d’évacuation.
Pour les maintiens de revenus, des assurances expatriés existent aussi, mais attention, rares sont celles qui couvrent les indépendants, ça sera un point à surveiller lors de l’adhésion.
Pour la retraite du freelance, des solutions de capitalisation via l’assurance vie existent, mais elles devront peut-être être souscrites avant votre départ. D’autres solutions internationales d’épargnes existent. Plusieurs banques se sont spécialisées sur les clientèles d’expatriés et offrent des services dédiés (HSBC, Banque Transatlantique, BNP-Paribas, etc.).
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